Détail d'une robe, ikat chaîne
Urgut, Ouzbékistan
Pua kumbu, ikat chaîne
Iban, Sarawak, Malaisie
Coiffe de deuil
Mazières sur Béronne
Motif à l'araignée, ikat trame
Okinawa, Japon
Détail d'un sarong, ikat chaîne
Sikka, Flores, Indonésie
Panneau de soie, ikat chaîne
Boukhara, Ouzbékistan
Saintongeoise
Détail de la coiffe
Fresques de l'abside
Kobayr (Arménie)
Visage
San Juan de la Pena (Aragon, Espagne)
Carré du marais
St-Hilaire la Palud
Voussure du portail
Foussais
Nous tentons...
Poème (Rémy Prin)
Détail d'un khatchkar
Gochavank (Arménie)
Bestiaire au portail sud
Aulnay
Il n'y a jamais...
Poème (Rémy Prin)
Tissu de flammé, ikat trame
Charentes, France
Les églises du monastère
Noravank d'Amaghou (Arménie)
Hinggi kombu, l'arbre à crânes, ikat chaîne
Kaliuda, Sumba, Indonésie

Ce qui a duré
dans la mémoire des hommes,
ce qui fait culture,
paysages de la terre
ou pays de l'esprit,
ce qui peuple le voyage,
les vies, la plénitude,
le patrimoine, ce n'est rien
que ce lien fragile
de ce que nous sommes
à ce que nous devenons.

Ananauri, sur la route du Grand Caucase

C’est la route du Nord, qui monte vers la Russie, la voie des invasions depuis toujours, la grande route militaire dit-on aujourd’hui.

On suit la vallée de l’Aragvi, et, tout proche de la route, près d’une grande retenue d’eau, un ensemble fortifié avec en son sein deux églises et une tour défensive. Muraille du pouvoir civil, celui des puissants ducs de cette région, qui protège le religieux. Nous sommes aux XVIe et XVIIe siècles, dans une période de guerres permanentes avec les pouvoirs voisins.
C’est la grande église qui est la plus spectaculaire, par sa sculpture surtout. Une fois passée l’entrée de la forteresse, la grande façade saisit le corps. La pierre et le style des reliefs rappellent certaines églises d’Arménie, cette alliance de moulures fortement affirmées, d’entrelacs si présents dont ici au cœur de la croix immense, et de figures – personnages, anges ou bêtes – dont la sculpture semble sommaire, mais qui pourtant fait une présence puissante.

ananauri facade

Tout en haut, près du sommet de la croix, un ange allongé, qui émerge d’une longue pierre, les ailes proches du corps, les plis du vêtement qui allongent sa silhouette, et son visage tourné vers nous, fait de si peu de traits, de si peu de volume, mais qui interpelle tant qu’on reste à le regarder longtemps. Et l’œil écrit en soi des questions sans réponses.

ananauri ange

Les motifs font dialogue aux images, tout est lisible, les grands arbres de vie, somptueusement ouvragés, coiffent d’autres anges, des lions allongés sont attachés aux rosaces. On s’attarde, on voudrait tant s’emplir de ces grandes pierres ocres, comprendre les gestes de ces sculpteurs, le contexte de cet art de la fin du XVIIe siècle qui nous semble si puissant dans sa presque naïveté, et dont on dit qu’il est influencé de thèmes païens de la Perse.
À l’intérieur, des fresques, un ensemble dédié à l’assemblée des élus devant le Christ triomphant de l’Apocalypse, un autre à une vaste pesée des âmes. Et sur les piliers, des saints guerriers, ou des Pères de l’Église. Comme à l’extérieur, l’alliance de la guerre et du religieux, une approche des visages touchante, au bord presque de la tristesse.

ananauri saint guerrier

Ainsi va le territoire géorgien, si dense d’édifices qui couvrent la terre et les siècles, et qui viennent sur vous vague sur vague, comme un enchantement renouvelé qu’il faut vivre sans doute avec l’âme de l’enfance faute d’être désemparé. On se dit qu’il faudrait un temps long pour s’immerger vraiment, relier les fils, aller au-delà du voyage. Le regard avoue très vite sa finitude, son manque.

En 2013

Écriture le 02/04/23

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