Gochavank
Le monastère vu du bas de la colline
Ketcharis
Le bac à bougies
Tatev
Motif sur le tambour de la coupole
Geghard
Des femmes vendant leurs gâteaux
Areni
Pierre tombale près de l'église
Tegher
Croix sur les pierres de la façade
Edjmiadzin
Église Shoghakat • Détail de la façade ouest
Moro dzor
Chemin dans le village
Erevan
Manuscrit au Matenadaran
Gochavank
Tympan • Chapelle de l'Illuminateur
Sevan
L'église des Saints Apôtres et le lac
Noradouz
Détail d'un khatchkar
Bjni
L'église Saint-Serge
Kobayr
Visage du Christ de l'abside
Ererouk
Restes de la façade
Noradouz
Le troupeau qui rentre au village
Haghbat
Église St-Signe • Les donateurs, Sembat le roi et son frère Gourguen
Aghitou
Une pierre tombale
Yovhannavank
Église St-Jean-Baptiste • Le tympan, parabole des vierges
Makaravank
Église principale • Motif polylobé

Terre perdue
dans l'entre monde
peuple dispersé
comme jamais témoin
de notre devenir.


Terre précaire
depuis toujours
entre la résistance
et l'universel.

Ketcharis est au bout de la ville un monastère à trois églises. Dès l'entrée de l'enclos, ce qui frappe c'est le jeu visuel que les architectes ont voulu là certainement, maniant l'alignement strict des églises pour qu'on les voie en dialogue, la cathédrale protégeant la minuscule église Saint-Signe à ses côtés. L'œil passe d'une coupole à l'autre, il se nourrit de l'échange, élancements semblables et différents. Est-ce le monde presque urbain qui nous entoure ? L'univers ici semble lisse, pelliculé, comme si l'on avait enlevé à ce lieu un fragment de sa mémoire. C'est aussi Grigor Magistros, le prince de la famille Pahlavouni9, qui a construit le grand bâtiment Saint-Grégoire, mais le souvenir semble ici comme dans un livre d'histoire, dans la distance de l'intelligence, quand à Bjni quelques kilomètres plus bas, il se serrait dans la chair d'un village et des hommes.

Ketcharis, les trois églises
'...L'univers ici semble lisse, pelliculé...'

Est-ce le flux léger des touristes arméniens, ou le mince étal à souvenirs qu'un prêtre tient sous l'arbre ? Et pourtant rien ne corrompt la beauté puissante de ce lieu, l'équilibre des minces piliers, des arcatures qui se détachent sur les grandes pierres de taille, les emboîtements des toits dans la lumière, l'absolue respiration des coupoles sur le ciel. Mais dans ce sentiment que tout est en place, ce qui fait proprement l'héritage d'un peuple semble s'estomper. Et l'on se dit soudain l'extrême ténuité de ce qui fait patrimoine, au-delà du savoir.


Il faut pénétrer à l'intérieur, s'approcher du bac à sable où les bougies dansent leurs flammes fragiles toujours renouvelées, il faut attendre pour renouer le fil. Et la voix de Sona qui chuchote dans le jamatoun10, qui montre l'endroit où l'on stockait les manuscrits, et les voûtes lourdes, profondes, qui prolongent en soi l'espace à nouveau. À quoi tient, d'un moment à l'autre, la cohérence évanouie ou le chant retrouvé ? Comment préserver la réalité de la mémoire, celle qui nourrit le lieu, comme l'imaginaire de ceux qui viennent y chercher l'indicible ?

 

Ketcharis, bougies dans la cathédrale
'...la cohérence évanouie ou le chant retrouvé...'

-----

9 La famille Pahlavouni est une des grandes dynasties arméniennes, du Xe au XIIe siècles.
10 Le jamatoun (prononcez djamatoun), dans l'architecture religieuse d'Arménie, est un bâtiment en général assez vaste, rectangulaire, qui est adossé à la façade ouest de l'église. Celle-ci, souvent de taille modeste, est agrandie par le jamatoun où les fidèles se rassemblent.